Deux jeunes écrivains français, Nicolas Delesalle et Miguel Bonnefoy réinventent la tradition de l’écrivain voyageur.

« Mon enfant, ma soeur, songe à la douceur. D’aller là-bas vivre ensemble ! ». Nicolas Delesalle et Miguel Bonnefoy avaient peut-être en tête ces vers fameux de Baudelaire, tirés du poème au titre si évocateur L’invitation au voyage, au moment de commencer les périples dont témoignent leur dernier livre. Avec Le goût du large pour le premier cité et Jungle pour le second, ils ravivent
en tout cas une tradition qui s’est un peu perdue, celle des écrivains voyageurs.

Hommes aux semelles de vent, tels Nicolas Bouvier ou Biaise Cendrars, sans cesse à la recherche d’horizons lointains et de sensations inédites qu’ils s’efforcent ensuite de retranscrire sur le papier. De telles impressions on les trouve à foison dans Le goût du large, le deuxième roman de Nicolas Delesalle. Grand reporter, il a longtemps sillonné la planète, allant partout, y compris dans les pays les plus dangereux, où l’actualité l’appelait.

Lors d’une croisière sur un gigantesque cargo, il se dépouille volontairement des appels incessants de son téléphone et de son ordinateur, pour écrire ses souvenirs les plus marquants. Confronté à l’immensité liquide, il ressuscite avec humour différentes ambiances, de Tombouctou à Tallinn, de la place Tahrir en ébullition, au silence des paysages de l’Aveyron. Sans oublier d’étranges rencontres à Kaboul.

L’expérience de Miguel Bonnefoy est moins diverse. Mais elle est unique et longuement approfondie. D’une façon sensible et poétique, Jungle, son récit, retrace les quatorze jours qu’il a passés dans la jungle vénézuélienne. Il fraye son chemin à la machette dans une végétation à la densité inconnue, affronte une vertigineuse descente en rappel, aussi bien que de visqueux marais peuples d’énormes rats… Et surtout, il rencontre des habitants de ces lieux préservés de toute civilisation.

Une note féminine pour terminer ? Citons Le grand marin, un livre de Catherine Poulain (éditions l’Olivier) qui nous emmène dans le Grand Nord, en Alaska, partager le rude quotidien des pêcheurs de morue noire, crabe ou flétan. Bon voyage…

Article de Nicolas Blondeau à propos du livre Jungle, et publié en mars 2016 dans Le Progrès.